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Une bibliothèque de pierres

Le Bureau de projet Télescope Einstein – Eurégio Meuse-Rhin recueille tous les échantillons de sol provenant de l’étude du sol dans la zone de recherche du Télescope Einstein dans un nouvel entrepôt à Aubel, en Wallonie. Cette « carothèque » sera une mine d’informations précieuses pour les géologues, estime le géologue Geert-Jan Vis.

Geert-Jan Vis (Jan Vos Photography)
Geert-Jan Vis (Jonathan Vos Photography)

Les spécialistes de la géologie procèdent à une série de forages en vue de déterminer le meilleur emplacement pour le Télescope souterrain Einstein dans la région frontalière de la Belgique, des Pays-Bas et de l’Allemagne. Pour entreposer et examiner en toute sécurité la roche forée, l’équipe du Télescope Einstein ouvre un site de stockage dans la ville wallonne d’Aubel. Le géologue Geert-Jan Vis (Service géologique des Pays-Bas, qui fait partie de TNO) participe au projet et parle du nouveau site.

Qu’est-ce que c’est, une carothèque ?

« Dans le cadre de nos forages, nous extrayons des centaines de « carottes » du sol, des barres de roche d’un mètre de long. On peut les comparer à un trognon d’une pomme, que vous retirez à l’aide d’un vide-pomme. La carothèque d’Aubel constitue un site de stockage pour ces carottes de forage. Il s’agit d’une bibliothèque pour les pierres. Dans un bâtiment de 27 mètres de long, des rayonnages accueillent toutes les carottes de chaque forage comme ceux d’E-TEST à Banholt, Cottessen et Aubel. Mais aussi des futurs forages. »

Pourquoi à Aubel ?

« Aubel occupe une place centrale dans la zone de recherche du Télescope Einstein, ce qui nous permet d’acheminer facilement les carottes provenant des sites de forage. De plus, nous sommes proches des laboratoires universitaires de Liège et d’Aix-la-Chapelle notamment, où nous souhaitons étudier le matériau foré à l’avenir. »

Qu’advient-il de ces morceaux de pierre lorsqu’ils arrivent ?

« Nous commençons par les contrôler, les étiqueter, les enregistrer et les photographier, conformément à la méthode d’administration de TNO. Nous souhaitons également organiser des ateliers avec des géologues et des géotechniciens. Ensuite, nous comparons des carottes provenant de différents forages et nous les analysons pour déterminer si les résultats correspondent à nos attentes ou s’ils sont différents. »

Qu’est-ce qui rend cette région intéressante pour le Télescope Einstein ?

« Cette zone frontalière est composée de couches de roches anciennes et résistantes qui se trouvent près de la surface, par exemple du grès datant du Famennien. Cette roche solide, vieille de quelque 370 millions d’années, semble posséder les bonnes propriétés pour accueillir le Télescope Einstein. De plus, la région contient du calcaire vieux de 70 à 80 millions d’années, mieux connu sous le nom de marne, une roche tendre qui amortit les vibrations de surface causées par l’activité humaine. »

Si ces informations sont déjà connues, à quoi servent les forages ?

« Nous voulons encore mieux comprendre le fonctionnement des couches terrestres. En effet, elles n’ont pas la même profondeur partout ; elles ondulent, pour ainsi dire. Pour planifier des tunnels, nous devons être en mesure de prévoir exactement où nous rencontrerons quelles couches et quelles sont leurs propriétés. La résistance, la perméabilité à l’eau, la sensibilité aux fractures : le seul moyen de les déterminer est de procéder à des forages. »

Comment avez-vous été impliqué dans ce projet ?

« Mon port d’attache est le bureau du Service géologique des Pays-Bas à Utrecht, où nous étudions la géologie de l’ensemble des Pays-Bas. En 2017, je me trouvais déjà dans le Limbourg du Sud pour étudier le calcaire, pour les eaux souterraines, lorsque j’ai appris qu’un collègue, Bjorn Vink, effectuait une étude du sol pour le Télescope Einstein. Au fil du temps, nous nous sommes rencontrés pour discuter de manière informelle et partager des informations. TNO a aussi récemment rejoint officiellement l’étude du sol pour le Télescope Einstein, il était donc évident que j’y participerais. »

Un sacré voyage, d’Utrecht au sud du Limbourg.

« D’Utrecht, oui, mais j’habite à Maastricht. Entre 2013 et 2015, j’ai coécrit un livre avec un collègue sur le vin néerlandais et la relation entre le vin et le sol. Nous avons tellement aimé la combinaison de la géologie et de la gastronomie dans le Limbourg du Sud que nous nous y sommes installés. »

Combien de temps cette carothèque restera-t-elle en fonction ?

« Au cours des prochaines années, nous collecterons des roches dans la zone de recherche afin de déterminer le meilleur emplacement pour les sommets et les tunnels du Télescope Einstein. Une fois que l’emplacement de l’infrastructure aura été décidé et que la construction sera achevée, nous transférerons la roche dans les pays où elle a été forée. En fait, ce type d’études fournit une mine d’informations sur ce qui se trouve dans le sol. Par exemple, pour savoir où trouver de l’eau chaude pour la géothermie. Une bonne recherche aboutit toujours à quelque chose d’intéressant. »

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