Explorer les frontières de la science
Morgane Zeoli est doctorante à l’ULiège. Elle se concentre sur les capteurs cryogéniques utiles pour limiter les sources de bruit limitantes pour les détecteurs du Einstein Telescope, dont le bruit thermique du revêtement du miroir et des suspensions. Pour répondre à ces défis, les miroirs de ET vont être suspendus par des super-isolateurs et seront soumis à des températures cryogéniques.
Sa thèse consiste à développer de l’instrumentation efficace à froid. Dans un article récent, elle a placé plusieurs éléments clés d’un interféromètre dans un cryostat afin de valider le bon fonctionnement de ces éléments optiques à température cryogénique ou, dans le cas contraire, trouver une solution. En effet, à température cryogénique, les propriétés de certains matériau, dont les semi-conducteur, évoluent de façon inattendue. Une recherche passionnante pour l’Einstein Telescope qui pourrait avoir des implications dans d’autres domaines technologiques !
Qu’est-ce qui vous inspire ?
« En tant que jeune chercheuse, ma fascination pour l’espace et les défis technologiques m’a toujours poussée à explorer les frontières de la science. Les détecteurs d’ondes gravitationnelles incarnent parfaitement ce défi. Détecter ces ondes depuis la Terre exige des instruments qui dépassent les capacités actuelles, créant ainsi un terrain de jeu pour l’innovation technologique. Ces défis techniques me motivent et me donnent l’impression de contribuer à quelque chose de grand. »
Comment débarque-t-on dans le projet Einstein Telescope ?
« Mon parcours en recherche a vraiment pris forme lors de mon Travail de Fin d’Études (TFE) au Precision Mechatronics Laboratory de l’Uliège, sous la direction du Professeur Christophe Collette. Travailler sur la suspension d’un capteur inertiel m’a passionnée, et cette expérience a été le tremplin pour une offre de doctorat sur les capteurs inertiels cryogéniques. Ce domaine, que j’ai découvert presque par hasard, m’a semblé une suite logique et enrichissante. »
Et après la thèse, il se passe quoi ?
« Après ma thèse, si le Télescope Einstein est construit à la trifrontière, je me vois bien continuer dans ce domaine, peut-être en post-doc. Participer à un projet de cette envergure est une opportunité incroyable, et j’aimerais suivre son évolution jusqu’à son aboutissement. L’avenir des détecteurs d’ondes gravitationnelles est prometteur, avec de nouveaux types de détecteurs en développement. Chaque nouvel instrument offre une nouvelle façon d’explorer l’univers, et contribuer à ces avancées est extrêmement gratifiant. »
Défis techniques
« Mon travail consiste à développer des capteurs inertiels cryogéniques capables de mesurer des déplacements infimes à des températures aussi basses que 20K (-253°C). Les défis sont nombreux : les matériaux se contractent et perdent leur élasticité, l’électronique fonctionne mal, et l’alignement précis des composants optiques est crucial. Par exemple, certaines photodiodes, essentielles pour mesurer le signal laser, deviennent inefficaces à basse température, rendant le capteur aveugle. Nous avons dû modifier la composition des semi-conducteurs pour maintenir la sensibilité à 20K. »
Application et impact
« Mes recherches peuvent améliorer la sensibilité des futurs détecteurs comme l’Einstein Telescope en atténuant le bruit thermique et sismique qui limitent les mesures à basses fréquences. Les capteurs cryogéniques que je développe permettent de vérifier l’efficacité des systèmes d’isolation et de réduire les vibrations indésirables. Ces avancées pourraient également s’appliquer à d’autres domaines, comme les ordinateurs quantiques cryogéniques, par exemple. C’est tellement passionnant ! »